28 juin 2010

Mon travail à l'Expo 67

En 1967, je suis étudiant à Polytechnique et le travail d'été se passe à l'Expo 67. Mon épouse travaille avec une fille dont le mari est bien placé à l'Expo. Il réussit à me placer sur une liste pour aller à des entrevues.

Les systèmes sont mal foutus et je n'étais jamais officiellement retenu, ni officiellement rejeté.  Mon contact me disait toujours où avait lieu la suite et je m'y présentais. Il y avait tellement d'erreurs, que c'était normal de ne pas être sur la liste.

Je devais travailler à "l'Homme et la Cité", ce qui englobait Habitat 67. J'étais tout fier de pouvoir tout apprendre sur les villes du futur et sur ce type d'architecture.

Hélas, un mois avant l'événement, on m'avise qu'il y a trop de monde et que je ne serai pas retenu. Mais, le pavillon voisin, le Labyrinthe, géré par l'ONF, manque de personnel et on m'y envoie.

Si on pense qu'Expo 67 était mal géré, l'ONF n'avait rien à leur envier dans le domaine de la mauvaise gestion. Mais j'ai eu un emploi, et ce fut payant.

Le Labyrinthe était situé sur la Cité du Havre, tout à côté d'Habitat 67. Il y avait 4 étages et 3 salles par étage que les visiteurs devaient visiter une à la suite de l'autre, un vrai labyrinthe reprenant le thème du Minotaure, ou l'Homme à la recherche de l'Homme et du dépassement de soi. Ce pavillon a été conçu par des cinéastes de renom, dont Colin Low, qui devint un des créateurs d'IMAX, suite aux travaux faits pour le Labyrinthe.

 Dès les premiers jours de l'Expo, j'ai senti que l'été serait long à entendre  la même chose, 6 à 8 fois par jour, à l'intérieur d'un bloc de béton.

Comme on était un peu hors circuit, il n'y avait pas beaucoup de visiteurs. Ailleurs, il y avait foule et un journaliste de La Gazette avait noté qu'une file s'était formée derrière un homme qui attendait quelqu'un à coté d'une porte inutilisée. On a alors eu l'idée de créer une file.
Normalement, on entrait sans attendre. On a obligé les gens à attendre quelques minutes. En moins de deux heures, on avait une file bien vivante.

 Les premiers jours de l'Expo, fin avril 67, il faisait chaud. Mais quelques  jours plus tard ce fut assez froid. Peu de personnes voulaient aller dehors.  Nous n'étions que quelques uns à le faire et parce qu'on avait travaillé dehors  au froid, tout l'été on a eu le privilège de pouvoir travailler à l'extérieur  en priorité. Beaucoup mieux que de réentendre les films encore et encore. Il y  eut du soleil, de la pluie, des orages, des confrontations avec les  spectateurs, bref, un bel été.

Plus tard dans la saison, nous avons eu les files les plus longues de tout l'Expo. Le matin en quelques minutes, la file se constituait et on comptait les gens. On les avisait qu'il était possible qu'ils ne puissent entrer pour le dernier spectacle de 22:00. Et cela arrivait fréquemment. 

Pour fermer les portes, on portait un casque protecteur, et par en arrière de la file, avec un mégaphone, on demandait l'attention des gens. Ils se retournaient et lentement, en français et en anglais, on annonçait que le prochain spectacle aurait lieu à 10 heures, le lendemain matin.

Pendant ce temps, les portes d'acier étaient fermées et verrouillés et on partait en  courant, recevant toutes sortes d'objets lancés par les gens déçus. On les avait pourtant avertis. Pour arriver les premiers, il fallait habiter sur le site soit en  logeant à Habitat 67 qui avait quelques unités en location, ou encore avoir un emplacement à la marina. Les autres ne pouvaient entrer sur le site avant l'ouverture à 09:30

Le système de gestion était inexistant ou à tout le moins inadéquat.  On a fait  beaucoup d'argent. Au début de l'été, pour être juste avec tous, on a distribué  les congés de fin de semaine équitablement entre tous. Tout le monde avait le  même nombre de congés pour la saison.

Si on n'entrait pas travailler, on n'était pas payé. Si on travaillait lors de notre premier jour de congé prévu pour la semaine, c'était temps et demi et temps double pour la deuxième journée.

Rapidement, on s'est échangé nos jours de travail. Tu as congé vendredi et samedi et moi j'ai congé dimanche et lundi. Alors, je n'entre pas vendredi et samedi et tu me remplaces. Tu fais de même dimanche et lundi et je te remplace. Au total, je travaille 5 jours et je suis payé pour 6 et demi et toi de même.

Quand ils s'en sont rendu compte, septembre arrivait et je suis reparti à Polytechnique. Avec un beau motton.

Je n'ai presque rien vu d'Expo 67. On en reparlera dans un autre texte.

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