2 juin 2010

Un tour d’hélico à la Baie James

En mars 1974, quelques jours avant le fameux saccage, je me rends à LG2 pour analyser la problématique d’implantation d’un système de comptes fournisseurs ( comptes payables ). Les fournisseurs doivent être payés sans délai après la réception de la marchandise sur le chantier. Certaines marchandises arrivent par avion, mais la plupart arrive en hiver par camion, sur la route aménagée à partir de Matagami. Au début du chantier, la route utilisait des ponts de glace ( armés par des billes de bois ) et elle n’était praticable que quelques mois par année. Aussi, les fournisseurs qui avaient préparé le matériel de longue date ne toléraient pas de délais de paiement.

À cette époque, les communications satellitaires étaient inexistante et on avait même pensé utiliser une transmission radio à 50 bauds ( oui 50, alors que la norme était déjà à 9600, loin de nos mégabits d’aujourd’hui ). Pendant quelques jours, on a évalué comment procéder et quel genre d’équipement on aurait besoin.

LG2 était déjà un village de plus de 800 personnes, avec des roulottes, cafétéria, eau courante, etc. Et, il y avait, à une centaine de kilomètres, un autre chantier en préparation, LG3. Le seul moyen d’y aller facilement, c’est l’hélicoptère. Il y a une route en construction, mais elle est encore impraticable par des véhicules normaux, surtout en hiver.

Je demande donc pour y aller et on me refuse car je n’ai pas les vêtements appropriés pour m’y rendre. Il faut compter des habits assez chauds pour la survie, au cas où l’hélico défaille et qu’on doive bivouacer quelques jours en forêt par -40C.

J’insiste et, le saccage étant en préparation, le directeur du chantier, Laurent Hamel, a d’autres préoccupations et finit par m’autoriser à y aller, la météo semblant assez bonne pour la journée. Je me présente pour le voyage. Le pilote, américain avec expérience du Vietnam, me reçoit en jeans avec un léger manteau d’aviateur en cuir. Parfait pour le -30C qu’il fait. Au moins, c’est le
soleil sans nuage. Et j’aime bien son attirail de survie. Si c’est bon pour lui, je n’ai pas à m’en faire. On décolle comme un pendule. Mon cœur finit par suivre et rien ne sort de mon estomac. C’était pourtant bien essayé.

Il n’y a pas encore de GPS et les cartes de cet endroit sont inexistantes ou imprécises, donc inutiles. On vole à vue en suivant les lignes d’arpentage, les bouts de route en construction, les quelques repères visuels installés pour le projet. Bref, on y va « from the seat of the pants » du pilote.

On atterit sur une mini-plateforme de bois, au centre du village. C’est 21 tentes, chauffées par des poêles à bois. Seule la tente principale qui sert de hall/cafétéria/salle de conférence est électrifiée, sans doute par génératrice.

Disons qu’ils n’ont pas reçu d’équipement informatique avant plusieurs mois et que la paperasse a eu cours quelques années encore sur ce chantier.

On est revenu en fin de journée ( vers 15 :00 à cette latitude en hiver ) C’est à ce moment que j’ai réalisé qu’il fallait qu’on revienne sans pépin car, sans équipement de survie et sans soleil, c’eut été assez difficile dans le bois.

Le lendemain, je suis revenu à Montréal par le dernier vol de Nordair de la journée. Et quelques heures plus tard, le saccage commençait et mon compagnon d’aventure, resté pour quelques jours, fut ramené par un des vols d’évacuation, à 4 heures du matin.

Ce fut mon premier et mon seul vol en hélicoptère. Tout un vol au dessus d’un magnifique pays.

1 commentaire:

  1. sais-tu, ta vie est pas si platte que ça, attends que je te raconte la mienne....:)

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